Au début de l’Histoire de la littérature et des Femmes, celles-ci n’avaient pas le droit d’écrire pour être publiées ; pour contourner cet interdit, elles prenaient un pseudo masculin ou publiaient de façon anonyme telle Madame de La Fayette (1634-1693) l’auteure de La Princesse de Clèves, l'un des premiers romans psychologiques, publié anonymement. Roman novateur, moderne, fondateur, qui inspirera plus tard d'autres écrivains dont Stendhal. Les souffrances paroxystiques de l’amour, les sentiments deviennent le cœur de l’intrigue et non des fioritures de l’action.
La nouveauté c’est l’état amoureux féminin frustré ou libérateur, raconté par une femme qui emprunte le chemin de l’émancipation.
Madame de La Fayette, faisait partie des précieuses, ces femmes lettrées de l’aristocratie, raffinées et expertes dans le jeu des sentiments et dans l'expression littéraire. Elles tenaient ou fréquentaient les salons où se retrouvait l’intelligentsia pendant la première moitié du XVIIe siècle. Les précieuses sont assidûment courtisées mais elles ne cèdent pas à leurs admirateurs.
Madame de
Lafayette reçoit dans
son salon littéraire les
grandes figures de son temps dont Racine et Boileau, de
plus une grande
et longue amitié la lie au
duc de la Rochefoucauld.
La
littérature était un passe-temps qu'elle dissimulait, cela aurait
été vu dans son milieu
social comme indigne de son
rang et de son sexe. « C’est
déroger que de se commettre au métier des lettres ». Toutes
ses œuvres ont donc été publiées anonymement ou sous couvert d'un
autre nom, comme le roman
Zaïde édité en 1669
sous la signature de Segrais, un
poète entré
à l'Académie française en 1662.
Trois
titres indicatifs :
La Princesse de Clève,
Zaïde, La
comtesse de Tende.
La princesse de
Montpensier, un autre de ses
romans, est un film réalisé
par Bertrand
Tavernier en
2010.
https://www.youtube.com/watch?v=6Mn6rMAJme8
(bande annonce)
Pour
en savoir plus sur l’œuvre et la vie de madame de
Lafayette
https://www.youtube.com/watch?v=sT_t-b3IUKw
Madame de la Lafayette fut très amie jusqu’à la fin de sa vie avec Madame de Sévigné (1626-1696). Celle-ci est connue pour sa correspondance d’une fréquence hors norme : 1120 lettres ont été recensées.
Cette
correspondance a pour origine le départ de sa fille mariée au Comte
de Grignan et jeune maman, de Paris vers la Provence. L'intensité du
désir d’écrire est sous-tendu par un autre désir : celui
d'entretenir une relation en dépit de la distance et des
circonstances qui les séparent.
La relation
épistolaire comble l’absence, au moins en partie, et témoigne d’un
lien affectif fort exprimé par la chronique
de la vie quotidienne et des sentiments qui l’accompagnent.
Femme
éduquée, présente à la cour de Louis XIV, Madame de Sévigné
écrit aussi pour plaire, pour communiquer ses états d'âme et pour
faire tomber la distance qui la sépare de ses destinataires.
Les
lettres qu'elle écrivit à sa fille, Madame de Grignan, sont
devenues un incontournable de la littérature française alors que
cette correspondance était initialement privée et que, de son
vivant, Madame de Sévigné n’avait pas l'ambition de publier ses
différentes correspondances.
Madame
de Sévigné est à présent considérée comme une écrivaine
classique et un modèle à suivre grâce à son style novateur ;
elle insère du naturel dans une forme plutôt habituellement
codifiée d’échanges écrits . Elle réfléchit aussi sur l’acte
d’écrire, forme de méta-littérature.
Un film sur sa vie a
été tourné en 2023, « Madame de Sévigné » réalisé
par Isabelle Brocard.
Présenté au
festival d'Angoulême en 2023, le film est sorti le 28 février 2024.
https://www.youtube.com/watch?v=deScageH9hA
L'émission
Secrets d'histoire sur France 2 du 18 août 2015, intitulée « La
marquise de Sévigné, l'esprit du Grand Siècle », lui était
consacrée.
https://www.youtube.com/watch?v=KFP9fmdp-Iw
Publication : Lettres de Madame de Sévigné.
Madame
de Sévigné serait-elle à l’origine du
roman épistolaire ? Eh bien non !
Les plus anciens
ouvrages épistolaires datent de l'Antiquité gréco-latine et
forment dès cette époque un genre propre. Le roman épistolaire est
un récit constitué d'une succession de lettres. Celles-ci servent
de support à la narration en constituant donc un récit discontinu.
Dans ce genre romanesque, chaque lettre s'adresse à un correspondant
particulier en même temps qu'au lecteur.
Madame de Staël (1766-1817) était comme les deux écrivaines précédentes (et comme sa mère) une salonnière, joli mot désuet qui signifie qu’elle tenait salon. Au XVIIe et XVIIIe siècles, l’écriture des femmes est considérée comme pratique de salon. Madame de Staël, fille du banquier Necker, ministre de Louis XVI, brillante et éduquée, recevait dans son salon tous les opposants à Bonaparte. Celui-ci l’exila, ce qui lui permit de voyager à travers l’Europe. Au cours de cette période elle rencontra Goethe et Schiller dont elle avait lu les œuvres et qu’elle souhaitait ardemment comprendre et se plongea dans les livres des grands auteurs de la culture allemande. Elle est la première théoricienne du mouvement littéraire romantique qui débute.
Elle écrivit sur les femmes pour les femmes, rédigea des textes politiques, elle y évoque le pouvoir que les lois ne leur ont pas encore donné et leur destinée opprimée. Elle pointe du doigt l’intolérance des hommes à l’égard des femmes qui expriment leurs talents.
Madame de Staël était une femme intelligente, indépendante d’esprit, influente, engagée en politique, libre, donc perçue comme incontrôlable. En quête d’amour, elle le trouva auprès de Benjamin Constant (intellectuel suisse, écrivain également, homme politique français) et auprès de nombreux amants.
Elle manifesta de
l’intérêt pour la condition féminine : « Il faut
faire naître le désir au lieu de commander l’obéissance ».
Elle
s’intéressa aux questions politiques : « C’est par le
progrès de la littérature qu’on peut combattre efficacement les
vieux préjugés ».
Citations extraites du livre :
« De la littérature, discours préliminaire ».
Madame de Staël était une femme moderne dans son comportement, assoiffée de connaissances, hyperactive, vaquant avec beaucoup d’énergie à tous les domaines de sa vie : amoureuse, amicale, mondaine, culturelle, littéraire et rebelle envers l’empereur Napoléon 1er . Son aisance matérielle et un terreau familial fertile y sont certes pour beaucoup dans cette vie très remplie et épanouie.
Quatre titres indicatifs : Corinne
ou l'Italie (roman d’émancipation, succès de
l’époque), Dix années d’exil (mémoires), De
la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions
sociales, Delphine (son premier roman de
forme épistolaire, forme de roman cité plus haut,
l’écrivaine y aborde les limites de la
liberté des femmes dans une société aristocratique).
Hommage à Madame
de Staël avec l’animation culturelle
Karambolage
https://www.youtube.com/watch?v=3svW7VTm-38
Madame de Staël fut
une femme que l’on qualifierait aujourd’hui de « cougar » ;
à 46 ans elle accouche d’un cinquième enfant conçu avec son
jeune amant de 22 ans, John Rocca.
Dans les enseignements et
conseils littéraires on sépare souvent l’œuvre de son
auteur.trice pour mettre sous le tapis ce qui est considéré comme
des atteintes à la morale ou à la bien-pensance ; mais peut-on
vraiment connaître ou comprendre les auteurs.trices ainsi que leur
impact sociétal, si l’on ne les connaît qu’au travers de leurs
écrits ?
Je ne mènerai pas débat sur ce sujet de fond,
je vous laisse y réfléchir à votre convenance…
A suivre en
juin un article sur : Les femmes autrices de romans érotiques,
l’été sera encore plus chaud ! Préparez vos vaporisateurs
d’eau pour vous rafraîchir pendant vos lectures !